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Canicule 2023: Péniblement maîtrisée…

Les Tunisiens suffoquent depuis une semaine, sous l’effet d’une canicule parfaitement prévisible. Certains pays comme la France, par exemple, ont instauré un Plan d’action national spécial canicule 2023 afin de sensibiliser la population et les cadres de la santé sur les gestes qui sauvent.


Les Tunisiens suffoquent depuis une semaine, sous l’effet d’une canicule parfaitement prévisible. Certains pays comme la France, par exemple, ont instauré un Plan d’action national spécial canicule 2023 afin de sensibiliser la population et les cadres de la santé sur les gestes qui sauvent. Ici, la vague de chaleur est telle qu’elle a nettement dépassé celle de 2018. Le mercure a enregistré des températures-records, disant long sur l’effet du réchauffement climatique et sur l’absence des mesures à caractère environnemental, à même d’atténuer ce phénomène.

Selon les estimations avancées par M. Mehrez Ghannouchi, ingénieur en météorologie, sur sa page facebook, la vague de chaleur se poursuit jusqu’au 20 juillet. Il est probable, par conséquent, que d’autres températures-records soient enregistrées d’ici là ! La semaine dernière, le gouvernorat de Kairouan a enregistré 48,4°C contre 48,3°C en 2018. Au gouvernorat de Sidi Bouzid, la température a atteint 46,9°C contre 46,7°C en 2018. Des températures records ont été également enregistrées à Gafsa (46,5°C) et à Tozeur (48,9°C). La canicule est connue aussi par des températures nocturnes oscillant entre 30°C et 40°C. Cet été, elles varient entre 30°C et 35°C dans les régions côtières et entre 40°C et 48°C dans les régions de l’intérieur, soit une chaleur qui excède la moyenne de 5 à 8°C.

Face à cette canicule, les Tunisiens tentent de s’acclimater le temps que cela passe. Les journées deviennent rudes, les nuits aussi. Il est difficile pour le corps humain de résister à une température ambiante dépassant sa température de 10°C ! Et même si certains disposent de la climatisation, laquelle est devenue depuis une décennie une nécessité, d’autres n’ont pas les moyens de se payer ce luxe et d’assumer les factures gonflées de l’électricité.

L’eau fait défaut !

Amir Bou Ragba est enseignant. Il habite à Nefza. Dans cette région, pourtant entourée de grands barrages notamment le barrage Kassab, le barrage Sidi Salem et, Sidi Barrek, l’eau fait défaut ou presque! Pourtant, la principale arme contre la canicule est l’eau. Boire de l’eau potable et se rafraîchir étant les principales mesures de précautions à prendre chez soi… Ce droit plus que légitime n’est pas aussi évident ! «La canicule est insupportable surtout avec les coupures d’eau. L’eau du robinet ne coule, en fait, que deux heures le matin et avec un faible débit dans une zone entourée de barrages…», indique Amir, mécontent. Et d’ajouter que faute d’entretiens desdits barrages, l’eau qui dépassait la capacité était versée dans la mer, et ce, depuis trois ans ! Amir sait parfaitement que, pour résister à la canicule, il est impératif de boire beaucoup d’eau et de prendre des douches fraîches, surtout pour les personnes qui ne disposent pas de la climatisation chez elles. Or, ce geste qui devrait sauver la situation s’avère être impossible à Nefza et dans toutes les régions où le raccordement au réseau de l’eau potable fait défaut. «Il est important d’éviter de sortir durant les heures de pic, à savoir entre 11H et 15H, ce qui n’est pas donné à tout le monde. Pour les travailleurs notamment ceux dont le métier exige de passer la journée dehors, comme les maçons et les agriculteurs, une telle précaution ne peut être prise», renchérit-il.

Bien avisé contre

la canicule

Parmi les personnes qui travaillent à l’extérieur figure Khalil Abdelmlak. Ce jeune papa travaille dans une société d’importation de céramiques et de sanitaires. La nature de son boulot l’oblige à rester longtemps exposé au soleil. Pour se protéger contre la chaleur et les UV, il enfile, immanquablement, un pull manches longues en coton et se couvre la tête d’un chapeau de paille «mdhalla». «La mdhalla en paille naturelle protège le visage, le cou et les épaules du soleil», précise-t-il. Tout au long de la journée, Khalil s’applique à l’hydratation de son organisme. «Je bois, quotidiennement, entre 3  et 5 litres d’eau. Je consomme aussi des oignons qui, dit-on, sont efficaces contre les coups de chaleur», renchérit-il. Une fois rentré à la maison, vers le coup de 15h, il prend sa douche et reste au frais et ne sort de chez lui qu’après la prière d’el Icha, soit après 21h30. Certes, Khalil et sa petite famille ne disposent pas de climatiseur, mais leur maison située au rez-de-chaussée, n’est pas trop exposée au soleil. Si Khalil parvient à maîtriser la situation en l’absence de climatisation, ce n’est point le cas de son père. «Pour mon père qui est âgé, poursuit-il, il a besoin d’être bien au frais. Pour ce, à la climatisation s’ajoute un ventilateur afin qu’il puisse se sentir bien et éviter d’éventuels malaises».

Ghasret el Marzem

Chahrazed, l’épouse de Khalil est originaire de Kairouan, où une température record a été enregistrée, récemment, soit 48,4°C. Sa famille souffre le martyre dans ce climat étouffant. «Ma famille n’a d’autre choix que de passer la nuit à la terrasse où il fait toujours très chaud…», indique-t-elle. Cette jeune famille est issue d’une famille d’agriculteurs. Elle a une toute autre explication pour la présente vague de chaleur. «Nous sommes en plein dans ce qu’on appelle dans le jargon des agriculteurs Ghasret el Marzem ; el Marzem étant le nom d’une étoile. Dans cette période, située entre le 7 et le 13 juillet, les températures atteignent un niveau très haut. C’est le moment propice pour les reptiles, les scorpions et les insectes de quitter leurs gites et de se multiplier. Un moment qui est à leur profit et à nos détriments», explique-t-elle, sarcastique.

Coupure d’eau et le distributeur d’électricité qui craque …

Le gouvernorat de Sidi Bouzid figure, aussi, parmi les régions les plus touchées par la canicule. Awatef Ben Abdallah, enseignante, y vit ainsi que sa famille. La semaine dernière, elle a dû mettre en marche deux climatiseurs afin de pouvoir tenir le coup. «Certes, mais j’étais obligée à chaque fois de remettre en marche le distributeur d’électricité qui, faute d’énergie suffisante, lâchait prise à chaque fois», indique-t-elle, ironique. Awatef débranche les climatiseurs le matin afin d’aérer la maison. Le soir, l’aération s’impose aussi le temps d’une heure, soit de 20h à 21H, puis rebelote ! «L’été a toujours été dur en Tunisie. C’est la saison chaude et c’est normal. Sauf que cela devient plus pénible à vivre, probablement en raison du manque d’étanchéité susceptible de réduire l’effet de la chaleur. D’autant plus que les foyers en étage sont plus concernés par les chaleurs que ceux au rez-de-chaussée», ajoute-t-elle. Awatef endure elle aussi les coupures d’eau. Elle prend son mal en patience, dans l’attente du programme qu’elle a concocté pour les vacances.

Clim’ non-stop !

Il faut dire que certaines personnes supportent mal la chaleur, plus que d’autres. Yosra Ben Abdennebi, responsable dans une société d’assurances, doit son bien-être à la climatisation. Cette jeune femme recourt à la clim tout au long de la journée, là où elle va. «J’habite dans un appartement au quatrième et dernier étage. L’orientation de l’appartement est vers le sud. Du coup, la chaleur est suffocante. C’est pour cette raison qu’une fois rentrée à la maison, je mets le climatiseur en marche, à la température minimale. Tant que je suis à la maison,  la clim fonctionne. L’idée de résister à la chaleur en fermant le climatiseur pour maîtriser la facture de l’électricité ne me tente aucunement», avoue-t-elle. D’ailleurs, au bureau comme en voiture, Yosra utilise la clim, comme par réflexe. «Durant cette période de grosse chaleur, je tiens à boire beaucoup d’eau, à me couvrir les bras lorsque je conduis et à appliquer un écran solaire, toutes les deux heures», ajoute-t-elle.

Manifestement, l’été 2023 serait des plus durs. Néanmoins, il est possible d’atténuer, désormais, l’effet du réchauffement climatique par des moyens simples, pas coûteux et qui ne demandent qu’une volonté commune pour les établir. M. Mehrez Ghannouchi, qui se trouve à chaque fois dans l’obligation d’annoncer une situation climatique redoutable, ne manque pas d’attirer l’attention sur des mesures ô combien à la portée de tous : planter un arbre devant chaque maison permettrait d’atténuer de 4°C les températures et réduire ainsi l’ampleur de la canicule. Autant le faire !

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